Elle est arrivée juste avant le premier grand rush des juillettistes. La septième vague de Covid-19 due au variant BA.5 d’Omicron s’installe depuis plusieurs jours déjà dans les Pyrénées-Orientales. Responsable du plateau technique de biologie moléculaire des laboratoires Médilab et Biopole 66 du groupe Inovie implanté à Torremila, le docteur Quentin Chevrier analyse la flambée et ses forts risques d’aggravation.   

Docteur Quentin Chevrier, un taux d’incidence de 1097 cas pour 100 000 habitants dans le département signifie-t-il un rebond ou carrément une flambée de l’épidémie de Covid-19 ? 

Nous observons une nouvelle flambée, je pense même plutôt une septième vague. Depuis la fin mai dernier, non seulement nous constatons l’apparition de nouveaux variants qui en sont des signes annonciateurs mais nous enregistrons également de plus en plus de cas positifs.

Combien précisément ?

Pour la seule journée de ce mardi 5 juillet 2022, nous avons par exemple analysé 1768 prélèvements RT-PCR pour les Pyrénées-Orientales dont 33,9% se sont avérés positifs et parmi eux 86,7% l’étaient au variant BA.5. 

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Retrouvez-vous de tels pourcentages de contaminations sur la semaine complète ?

Totalement. Sur la semaine 26 qui a couru du 27 juin au 3 juillet, on a relevé 34,4% de patients positifs pour 10 023 dépistages RT-PCR. Le variant BA.5 était alors localement majoritaire à 75,3%. Avant l’apparition du BA.5 importé d’Afrique du Sud et du Portugal et qu’on a découvert dans le département à la fin mai dernier, on était à environ 600 cas positifs par semaine. Or, dès la troisième semaine après l’arrivée de cette mutation, on avait déjà doublé les chiffres avec plus de 1200 personnes atteintes. De ce petit rebond, on est progressivement passé sur une phase ascendante désormais très importante. Le variant BA.5 a rapidement grignoté du terrain pour devenir aujourd’hui majoritaire à 85% alors que la situation n’est pas encore stabilisée.

La plupart des villes et villages des Pyrénées-Orientales dans le rouge

En quoi est-il différent de l’Omicron originel ? 

D’abord, plusieurs variants circulent en ce moment et on suit donc de près l’évolution de toutes ces mutations. Il faut se souvenir qu’Omicron est présent depuis novembre 2021 et qu’à l’époque il était en phase BA.1. Ensuite, on est vite passé sur la deuxième génération BA.2, puis à la fin du printemps sur les lignées BA.4, BA.5 et un de leur cousin qui, lui, est en train de s’effacer.

Depuis le début de la crise Covid, êtes-vous descendu un jour à zéro de positivité ?

Jamais. Mais on a connu des creux entre les vagues et maintenant on est en pleine remontée avec un nombre de cas dans les P.-O. en train de croître très rapidement. Sans oublier qu’on est dans une période charnière, estivale, avec un afflux touristique conséquent, des gros rassemblements, autrement dit on est sur un risque de contaminations élevé.

Un risque qui peut atteindre les personnes vaccinées et/ou qui ont contracté le coronavirus ces derniers mois ?

Ce nouveau variant BA.5 est potentiellement réinfectant pour les personnes atteintes d’un épisode de Covid récent, grosso modo dans les moins de six mois. On voit des patients qui ont eu la Covid-19 cet hiver et au printemps et qui sont recontaminés en ce moment. D’ailleurs, la DGS, Direction générale de la santé, nous demande expressément de confirmer les autotests et tests antigéniques positifs par RT-PCR. Actuellement, seuls 10% des tests antigéniques sont ainsi confirmés.

Plus de confirmations des mutations permettraient un meilleur suivi épidémiologique ? 

C’est l’objectif.  Au-delà de notre grande sensibilité de diagnostic, on recherche les mutations d’intérêt de ce virus et c’est ce qui nous permet au jour le jour d’établir un compte rendu épidémiologique précis de la situation sanitaire. Des informations qui sont indispensables à la DGS car nous ne pouvons pas déterminer à l’avance une immunité croisée entre les variants. Cela permet d’adapter les campagnes vaccinales et de prendre les décisions adéquates. 

Le virus n’est plus localisé, il est disséminé, la situation va s’aggraver

La situation vous inquiète-t-elle?

Forcément, dans le sens où le virus circule davantage, elle peut s’aggraver

La transmission du virus se concentre-t-elle toujours autour de clusters ?

Non, elle a changé. Aujourd’hui, la plupart des villes et villages des P.-O. sont dans le rouge. On recense plus de 30 à 40% de positivité dans tous les laboratoires de ville Inovie, Medilba et Biopole 66. Le virus n’est plus localisé, il est disséminé. À ce stade, on n’a plus du tout d’effet de zone.

Le BA.5 est-il plus agressif, plus contagieux que ses prédécesseurs ? 

Il semblerait qu’il ait des caractéristiques similaires à l’Omicron originel. Or, les hospitalisations et la réanimation étant décalées par rapport aux premiers symptômes de contagion, on aura des informations détaillées d’ici quelques semaines. Les P.-O. faisant partie des premiers départements de France à avoir eu ce variant, on saura si le BA.5 génère des formes plus graves que ses prédécesseurs quand la vague commencera son déclin. On interprète des valeurs factuelles, on ne peut pas les prédire à l’avance. 

Toutes les générations sont-elles impactées par ce variant ?

Pour vous donner un ordre d’idée, entre le 20 juin dernier et ce mercredi 6 juillet, on a détecté sur la plateforme Torremila 8413 cas positifs Covid d’un âge moyen de 52 ans. Sinon, tout confondu, le BA.5 atteint des bébés comme des centenaires. Nul n’est à l’abri. 

Un plateau technique renforcé pour l’été

La septième vague a obligé le groupe Inovie à recruter. Sur le plateau technique de biologie moléculaire, dix techniciens et biologistes oeuvrent de 8 heures du matin à minuit. « La semaine prochaine, on prolongera jusqu’à 1 heure du matin, puis 3 heures et enfin 5 heures si nécessaire », annonce Quentin Chevrier. 

« Depuis le début de la crise, on s’organise pour rendre les résultats des prélèvements RT-PCR en moins de 24 heures voire le jour même. On procède au criblage sur place, l’opération consiste à rechercher des mutations d’intérêt définies par les sociétés savantes et le gouvernement, puis on externalise l’activité de séquençage. En pratique, on sélectionne une certaine quantité d’échantillons positifs sur une journée et on les envoie dans un centre de séquençage du groupe Inovie pour déterminer l’intégralité du génome.« 

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« En plus des laboratoires de proximité, on aménage des centres de dépistage dédiés »

Toujours face à la recrudescence des contaminations Covid-19, les laboratoires Médilab et Biopole 66 s’organisent. « On s’adapte en permanence pour offrir le meilleur maillage possible dans le département. Ce mercredi 6 juillet, on a ouvert un centre de dépistage au Mas Capellans de Saint-Cyprien. Il s’ajoute à ceux du parc des expositions à Perpignan, du boulevard de Clairfont à Toulouges et à celui du centre culturel de Cabestany. Par ailleurs, quasiment tous les laboratoires de biologique médicale se sont organisés pour accueillir les patients en demande de tests. Des créneaux horaires leur sont en principe réservés », précise le responsable. Sans exclure la création ponctuelle d’autres points de prélèvements Covid-19.  

« Nous en ouvrons régulièrement en fonction des besoins pour ne pas être confrontés à un état de saturation des laboratoires de proximité. Cela demande beaucoup d’efforts car on est tenu de s’adapter au plus vite. Heureusement, nous avons un bon service RH pur anticiper nos besoins », se félicite Quentin Chevrier.

Des tests RT-PCR pour La Variole du singe

Si pour l’heure les laboratoires de biologie privés des Pyrénées-Orientales n’ont pas fait l’objet de demande de dépistage de la variole du singe, autrement appelé Monkeypox, Quentin Chevrier est formel. « On est prêt. Avec la pandémie Covid-19 nous nous sommes équipés pour dépister de nombreuses pathologies infectieuses nécessitant un RT-PCR. Nos laboratoires de ville se sont donc proposés pour réaliser ces recherches de virus émergeants. Nous ne sommes pas encore sollicités mais si l’épidémie s’accroît, on devrait intégrer le dispositif de dépistage », assure-t-il.

Source sur l’indépendant

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