

Le centre a ouvert la semaine dernière dans un hôtel au sud de la ville, Aline et sa petite-fille Camélia (*) née le 9 mars et testée positive au Covid-19, en sortent ce jeudi 2 avril 2020. Un grand soulagement pour tous leurs proches. La jeune grand-mère raconte comment la famille a été contaminée à la maternité, les semaines de stress qui ont suivi la naissance, et la vie en centre d’hébergement.
À 46 ans, Aline est la toute jeune grand-mère de Camélia. Sa fille a donné naissance à son troisième enfant le 9 mars dernier à la maternité de la polyclinique Méditerranée, route d’Argelès à Perpignan. C’était quelques jours avant le confinement. Toute la famille a été contaminée, à commencer par le nouveau-né.
Aline, d’abord comment allez-vous, la petite et vous ?
Elle va très bien, elle n’a pas de température, ni de difficultés respiratoires, elle est dynamique, souriante. Moi je suis en pleine forme, je suis surtout rassurée, on sort demain (ce jeudi 2 avril 2020), on a eu beaucoup de craintes, de peurs, on a vraiment passé des semaines stressantes.
Et comment va le reste de la famille ?
On s’inquiète pour la belle-mère de ma fille, qui est toujours hospitalisée, pas encore tirée d’affaire. Les autres vont bien.
Combien d’entre vous ont été atteints par le covid-19 et savez-vous comment c’est arrivé ?
Avec le recul, nous pensons que mon mari a été contaminé en travaillant dans les écoles. Mais à la naissance de Camélia, on n’avait pas réalisé qu’il avait été malade du coronavirus. Personne ne s’est inquiété. On est tous venus la voir à la maternité. Cela a été interdit peu de temps après, et je comprends pourquoi. Trois jours après la naissance, ma fille est rentrée à la maison avec le bébé, tout allait bien. Mais une semaine environ plus tard, Camélia et son autre grand-mère sont tombées malades. La petite a eu de la température, le médecin nous a dit d’aller directement à l’hôpital. Elles ont été testées positives. Ensuite ma fille et les deux frères et sœurs de Camélia ont consulté au centre covid Jean-Moulin, et eux aussi ont été diagnostiqués atteints du coronavirus.
Vous avez alors décidé de rester à l’hôpital avec votre petite-fille…
L’aînée de mes petites-filles était trop angoissée pour rester encore séparée de sa mère. Ma fille l’a vécu comme un déchirement, mais c’est moi qui suis restée. D’autant que, même si les médecins sont persuadés que je suis forcément infectée, je n’ai développé aucun symptôme. Je suis en pleine forme pour m’occuper d’elle. À la sortie de l’hôpital la semaine dernière, elle était contagieuse, alors les médecins nous ont envoyées au centre d’hébergement covid.
Comment s’y déroulent les journées ?
Personne ne peut venir nous y voir, mais mon mari peut venir nous porter des affaires par-dessus le portail. Et ma fille vient voir la petite de loin. À l’intérieur, tous les gens qui s’occupent de nous sont gentils, accueillants, toujours à nous demander si on a besoin de quelque chose, c’est vraiment impeccable. Le médecin vient nous voir deux fois par jour. Comme je cogite beaucoup, je me note les questions et quand il passe, il prend le temps de répondre à tout. Ce sont vraiment des gens de mérite. En plus, c’est hyperconfort, très propre, et on a même la télé.
Ce qui m’a marquée à vie, ce sont les chariots avec les cadavres
Vous pouvez échanger avec les autres malades ?
On se croise dans les coursives extérieures, avec les masques et on discute de loin. Et on peut se balader sur le parking.
De quoi vous souviendrez-vous le plus dans tout ça ?
On a été très inquiets, et on l’est encore pour l’autre mamie de Camélia. Mais ce qui m’a marquée à vie, ce sont les chariots avec les cadavres que j’ai vu passer dans la cour depuis ma chambre en pédiatrie à l’hôpital. Vraiment, il faut se préserver.